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Gabriel Tougas

Affable, facile d’approche et engagé au sein de la communauté franco-manitobaine, c’est par l’œil de sa caméra que le cinéaste Gabriel Tougas porte un regard curieux et pertinent sur la société qui l’entoure.

 

La scène se passe en juin 2013, à Edmonton, au campus
Saint-Jean de l’université d’Alberta. Devant des participants venus de toutes les Amériques pour participer à l’Université d’été sur la francophonie des Amériques organisée par le Centre de la francophonie des Amériques et discuter de la situation du français sur notre continent, les lumières se baissent. À l’écran, un documentaire : Ceci est notre message. Souvent avec humour, mais toujours de façon percutante, des jeunes défilent devant la caméra de Gabriel Tougas et viennent dire ce que c’est que d’être jeune francophone au Manitoba; comment ils se sentent de vivre en situation minoritaire; mais aussi ce qu’ils pensent des Québécois. Les propos font mouche, atteignent leur cible, grâce à la lentille du jeune cinéaste de 25 ans.

                                                                                              

Alors que ce dernier se destinait à des études en sciences politiques, le cinéma se dresse sur son chemin et le happe. Très tôt ses courts métrages sont remarqués par les réputées Productions Rivard de Winnipeg.

 

Quand l’occasion se présente de réaliser à l’âge de 19 ans la série Perspectives diffusée par TVA, Gabriel ne rate pas sa chance. Ses productions continuent d’être diffusées à la station privée. Il réalise par les temps qui courent la deuxième saison de Chacun sa route, une série diffusée les samedis après-midi sur des hommes et des femmes qui posent des gestes significatifs pour leur communauté dans des domaines aussi divers que le monde des affaires, la culture ou le sport.

 

Représenter sa communauté

 

Pour Gabriel Tougas, faire du cinéma en français, c’est normal, même s’il faut parfois ramer dur. « Dans l’Ouest, il n’y a pas toutes les infrastructures comme au Québec » à la disposition des cinéastes francophones. Pourtant, pour lui, « il y a de grands avantages » à tourner dans la langue de Gabrielle Roy, car selon lui, les Franco-Manitobains ont envie de se voir à l’écran, qu’il soit petit ou grand. Quand  l’objectif de la caméra de Tougas se pose sur sa communauté, ce n’est jamais de façon misérabiliste.

 

Le jeune cinéaste aime aussi mettre Winnipeg en scène, comme dans son premier long métrage de fiction, Héliosols, sorti en 2013 et portant sur un scandale entourant une société pétrolière. Il s’agit en fait du premier long métrage de fiction produit et réalisé par des francophones de l’Ouest canadien. « On ne voit pas assez Winnipeg pour la ville elle-même. La ville est parfois maquillée pour ressembler à d’autres lieux, mais pas assez à elle-même. »

 

Profondément enraciné dans son milieu, Gabriel Tougas n’est pas près de déménager de son Manitoba natal, même s’il ne dirait pas nécessairement non à une éventuelle aventure professionnelle au Québec. « À l’extérieur de ma vie professionnelle, je suis très heureux d’être là où je suis. »

Tourner en français?
Une évidence pour Gabriel Tougas
!

Mariette Mulaire

Mariette Mulaire :
l’économie au service de la francophonie

PDG du World Trade Center de Winnipeg, porte-parole au printemps dernier des Rendez-vous de la Francophonie 2017 (RVF), coprésidente des Jeux du Canada, Mariette Mulaire ne rate jamais l’occasion de mettre en valeur la francophonie manitobaine… et même canadienne!

 

Mariette Mulaire a fait du français l’un des moteurs de sa vie. Née dans une famille d’entrepreneurs, doublés de défenseurs du français (au lendemain du Vive le Québec libre!, son père recevait chez lui, au grand dam des autorités canadiennes, Philippe Rossillon, l’un des collaborateurs du général de Gaulle, alors que sa mère participait au journal La Liberté), la jeune Mariette réalise bientôt que, non seulement les Franco-Manitobains ont des droits, mais que le français peut aussi être une valeur ajoutée dans le monde des affaires.

Mariette Mulaire en pleine action en tant que co-présidente des Jeux du Canada, lors de l'ouverture officielle, en juillet 2017, à Winnipeg.

Au moment de l'ouverture officielle des Jeux du Canada, en compagnie du Premier ministre du Canada, Justin Trudeau. 

En créant un forum international de la PME comme Centrallia, le speed dating du monde des affaires, Mariette Mulaire montre aux anglophones que le français peut ouvrir des portes en les mettant en contact avec le milieu des affaires francophone.

 

Agir pour la fierté francophone

 

2017 aura été une fois de plus une année marquée par le sceau de l’engagement pour la dirigeante du seul World Trade Center bilingue du monde. « J’ai beaucoup aimé mon rôle comme co-porte-parole des RVF. » Le courant a bien passé entre elle et son collègue, Emmanuel Bilodeau, qui a des racines… franco-manitobaines! « On est même allé voir la maison où sa mère a grandi! C’était cool pour lui puisque sa mère avait écrit des choses au sujet de sa maison paternelle sur la rue Dumoulin... et que son frère Maxence Bilodeau (journaliste à Radio-Canada) avait vécu plusieurs années à Winnipeg. C’était donc de bien agréables retrouvailles! »

Plus récemment, en septembre, madame Mulaire a aussi été maîtresse de cérémonie du Colloque national en développement économique francophone, commémorant les 20 ans du Réseau national de développement économique et d’employabilité, mieux connu sous le nom de RDÉE Canada. « Puisque les RVF célèbrent en 2018 leurs 20 ans, il y a eu une collaboration entre les RVF et le RDÉE. Comme je patauge dans les deux sphères, j’ai eu l’honneur de présider le forum... Très cool!

 

Et ce ne sont pas les projets qui manquent. Une preuve? Selon l’ancienne vice-présidente du CA du Centre de la francophonie des Amériques, « au WTC de Winnipeg, nous avons commencé un nouveau programme d’exportation qui connaît déjà beaucoup de succès, et nous sommes sur le point de réaliser un projet où nous espérons mettre sur pied un ‘campus international’… » Mais on n’en saura pas plus pour l’instant.

 

Tout un parcours qui fait dire à cette femme dynamique et au regard brillant à propos des Franco-Manitobains : « Avant, on se faisait écraser parce qu’on n’était pas fier. Maintenant, notre attitude a changé. »

Louis Paquin

En 1995, Charles Lavack était  caméraman. Il était à la croisée des chemins : partir pour continuer son métier ou rester au Manitoba. De son côté, Louis Paquin avait été, pendant quelques années, directeur du Festival des Voyageurs. Il avait besoin de nouveaux défis. Il savait comment aller chercher du financement et connaissait un peu le milieu de la production. Les deux compères se connaissaient déjà. Ils savaient qu’ils pouvaient travailler ensemble dans le domaine de la production télévisuelle. De fil en aiguille sont donc nées
Les Productions Rivard.

« C’était l’époque, se rappelle Louis Paquin, où Téléfilm Canada ne
finançait pas les projets francophones hors Québec.  Nous étions allés
frapper à leur porte à Montréal pour un film sur Étienne Gaboury,
l’architecte, mais ça n’avait pas marché. Finalement, c’est ONF
Vancouver, qui nous avait aidés. Mais c’est le deuxième projet, celui
sur les serpents de Narcisse, qui nous a permis de voir venir pour les
18 mois suivants, car nous avons eu l’idée de faire une série sur les animaux de l’Ouest, Unique au monde, qui a été diffusée par TFO. »

Si Louis Paquin et Charles Lavack ont dû faire preuve de ténacité en tant que producteurs, le résultat est maintenant plus qu’intéressant. Des chaînes de télédiffusion comme Radio-Canada, UNIS, Historia et TVA suivent les traces de TFO en diffusant leurs documentaires. Pour TVA, c’est particulièrement la série Chacun sa vie réalisée notamment par Gabriel Tougas¹, qui a tissé les liens entre les deux entreprises.

Parmi les projets à venir, une nouvelle série diffusée par APTN, la chaîne autochtone, sera à l’antenne en 2018.

Maintenant seul à la barre, « mais avec toute une équipe », précise M. Paquin, ce dernier a encore bien des projets sur sa table de travail. « Nous explorons des avenues vers Netflix », dira-t-il en fin d’entrevue sans plus de précision cependant. Celui qui a équipé il y a trois ans son entreprise d’une unité mobile a toujours le feu sacré : « Ça nous permet d’aller produire sur place diverses émissions. Il le faut  puisque nous avons un projet avec l’archevêché de Winnipeg ! »

Si le Québec a eu son pionnier derrière la caméra avec Albert Tessier, le Manitoba a aussi eu son cinéaste en soutane en la personne de Léon Rivard. Il y a 22 ans, Louis Paquin, avec son comparse de l’époque Charles Lavack, lui rendait hommage en associant son nom aux Productions Rivard de Winnipeg, la plus ancienne entreprise franco-manitobaine cinématographique.

Louis Paquin : 22 ans au service du documentaire

Louis Paquin

¹ Voir l’entrevue avec Gabriel Tougas dans le numéro d’octobre du Nénuphar.

Carole Freynet-Gagné

laquelle on vit. Mon engagement envers ma famille  et ma communauté vient en premier, puis vient la carrière. Heureusement, j’ai la santé pour faire les deux. »

Quel est le lien entre les deux vice-présidences qu’elle occupe ? « Le WTC c’est un projet de société qui crée un pont entre les communautés entrepreneuriales anglophones et francophones du Manitoba. Nous avons voulu créer un centre où le bilinguisme soit mis en valeur dans le milieu des affaires. La francophonie doit être accessible à tous les francophones, qu'ils soient artistes, athlètes, scientifiques ou entrepreneurs. Ça doit être vivant et lié à tous les aspects de notre vie. » Une mission que veut remplir ce Centre basé à Québec, mais ouvert à tous les francophones des Amériques.

Carole Freynet-Gagné, une femme entière, qui ne compte pas s’arrêter là en matière de respect des droits linguistiques. Des vœux pour 2018 ? « Je voudrais que les entrepreneurs accordent plus d’importance à l’affichage en français. Il faut que la francophonie soit visible. Elle comporte tellement d’avantages. Il y a bien sûr des avantages sur le plan économique, mais aussi sur le plan social. Imaginez si tous au Manitoba affichaient dans les deux langues. On serait visible. On existerait à l’extérieur de la maison et de l’école. »

Carole Freynet-Gagné : Madame la vice-présidente

Autour d’une table de réunion, ce n’est pas celle qui parle le plus fort. Elle prend le temps d’écouter, de poser des questions. Puis elle passe à l’action. Depuis qu’elle est toute petite, elle s’investit dans ce qu’elle aime, notamment le français. « Très jeune, je savais que j’en ferais ma vie, ma carrière. J’ai deux carrières en simultané, traductrice et pédagogue. La traduction fait appel à mon souci du détail et à mon amour pour la langue, et la pédagogie fait appel à mon désir de transmission de la langue et de la culture. »

Pour Carole Freynet-Gagné, quand un choix s’impose –histoire de reprendre le slogan de sa boîte –, c’est indéniablement le français. Une passion qu’elle a su transmettre à ses quatre filles. « Elles sont toutes aussi engagées que leurs parents et c’est un beau cadeau de vie, ça. »

Mais comment la Franco-Manitobaine réussit-elle à tout faire ? « Je crois que c’est une question de priorité. Je veux contribuer à créer le milieu que je souhaite pour ma famille. On ne vit pas en silo. Je ne peux pas parler de partage à mes enfants et ne pas contribuer à la société dans

Carole Freynet-Gagné

Vice-présidente du World Trade Center (WTC) de Winnipeg et maintenant vice-présidente du CA du Centre de la francophonie des Amériques, Carole Freynet-Gagné est aussi propriétaire depuis 22 ans du bureau Freynet-Gagné Traduction et consultation. Elle est aussi aux commandes depuis 12 mois de la maison d’édition Apprentissage illimité, spécialisée notamment en littérature jeunesse, dont la trousse pédagogique Paul et Suzanne. Femme aux multiples fonctions, M     Freynet-Gagné carbure cependant à l’un des éléments essentiels de sa vie : la francophonie manitobaine.

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André Mahé

Depuis 25 ans, André Mahé fait grimper les amateurs de parois de tout acabit grâce au Club d’escalade de Saint-Boniface (CESB)… et tout ça en français!

environ 50 % des effectifs. « On n’a pas le choix, en milieu minoritaire d’accepter des anglophones. Mais comme notre passion à tous, c’est l’alpinisme, ça atténue bien des problèmes », confie M. Mahé.
Dans le cadre du 25
 ͤ anniversaire, il y aura un Festiglace les 24 et 25 février. Les bénévoles du Club se Saint-Boniface se feront une joie de faire découvrir à l’ensemble de la population les joies du mousqueton. Fin juillet, il y aura également la semaine « Découvrez la montagne » qui a lieu dans les Rocheuses avec, au menu, des parois à explorer.


André Mahé invite tous ceux et celles intéressés par le CESB à suivre la page Facebook pour découvrir les activités au fur et à mesure qu’elles seront affichées.


Pour en savoir plus sur le CESB, visitez le site Web.

Vous y découvrirez des petites vidéos qui vous donneront des idées de grandeur!
 

André Mahé : Tirer le français vers le haut

Dans une province dont le relief s’apparente au plat pays de Jacques Brel, cela étonne de parler d’alpinisme. « J’ai eu la piqûre quand j’étais jeune. Avec mes parents, on allait en vacances dans les Rocheuses. C’est là que j’ai vu du monde qui grimpait… ça me semblait intéressant! », rappelle le président du CESB. Puis en 1993, alors enseignant à l’École Précieux-Sang, il y installe un mur d’escalade avec l’aide d’un collègue et ami, Deny Gravel. Ce mur est toujours là.


Trois ans plus tard, une tour extérieure de 20 m est construite au coin de Messager et Taché… qui se transforme l’hiver en véritable mur de glace. Impressionnant.


Grimper en français


Mais au fait pourquoi un club d’alpinisme francophone? « Parce qu’on est francophone! » C’est tellement une évidence pour André Mahé. Regroupé au sein de l’Alpine Club of Canada, avec ses 140 membres, le CESB est l’un des rares clubs d’alpinisme francophones au Canada. Mais le club est aussi ouvert aux anglophones, qui représentent

André Mahé

Justin Johnson

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Justin Johnson : porter du sang rebelle en soi

À 26 ans, Justin Johnson a déjà une feuille de route impressionnante. Ancien participant aux Jeux de la francophonie canadienne en 2008 à Edmonton, ancien président du Conseil jeunesse provincial et maintenant président de la Fédération jeunesse canadienne-française, ces différentes étapes mettent en lumière la capacité de leadership de celui qui est né à Lorette, au sud du Manitoba. Mais encore plus important pour Justin Johnson, cela « incite les jeunes francophones à participer au processus décisionnel. »

Et à démontrer que les Métis francophones ont toujours leur place au Manitoba, l’autre trait caractéristique de celui qui fait une maîtrise en gouvernance autochtone. Fier de ses aïeux, il n’est absolument pas question pour celui-ci de renier ce double héritage. Selon lui, « ce n’est pas le pourcentage de sang autochtone » qui est le plus important, « mais le respect que je porte à mes racines autochtones et européennes », sorte « d’amour filial », pour reprendre les paroles de Louis Riel, comme aime à le citer Justin Johnson.

Servir d’intermédiaire

Même s’il ne nie pas que les relations entre Métis et Canadiens français n’ont pas toujours été au beau fixe, surtout après la pendaison de Louis Riel en 1885, il estime qu’il y a un lien évident entre les francophones et les Métis. C’est pour cela que, non seulement au sein de sa communauté, mais dans l’ensemble du mouvement de la jeunesse canadienne-française, Justin Johnson prend « le temps de parler et de s’engager ».

Pourrait-on voir un jour Justin Johnson en politique active alors qu’il est le premier à penser qu’il y a « une philosophie chez Louis Riel qui peut contribuer à l’avancement du pays »? À l'heure actuelle, il préfère bien étudier les écrits de Louis Riel, rappelant que ce dernier « croyait en une confédération où francophones et Métis ne perdraient pas leur identité culturelle. » Il est même d’avis que les Métis francophones doivent avoir un rôle à jouer au Sénat canadien. « Il est temps qu’on leur fasse une place. »

Gageons que cet arrière-arrière petit-fils d’André Beauchemin démontrera un jour que « le sang rebelle » qu’il a « potentiellement » dans les veines lui fera suivre les traces des pères francophones du Manitoba à l’accent mechif.

Certains sont tombés dans la marmite de l’engagement social quand ils étaient petits. Question de génétique sans doute. C’est le cas de Justin Johnson dont l’ancêtre, André Beauchemin, a fait partie du gouvernement provisoire de Louis Riel au XIX siècle.

Le président de la Fédération jeunesse canadienne-française, Justin Johnson, devant la tombe de Louis Riel.

Robert Freynet

grandes surfaces, les généreux coups de pinceau, la peinture onctueuse, la composition audacieuse mais toujours en harmonie avec l’architecture, la joie de la couleur… Et c’est un bonheur pour moi que d’être dans le quotidien des gens, avec mon œuvre sur un plafond d’église par exemple, ou sur le mur d’une institution. » Ses murales permettent ainsi aux gens de s’approprier un pan de leur histoire qu’elle soit religieuse ou qu’elle rappelle un épisode du Manitoba français.

 

« En même temps, la bande dessinée me passionne aussi. Au contraire de la peinture murale, ici, ce sont des cadres très réduits et nombreux sur une page, au dessin très détaillé. Tel un film sur papier, la BD est un art séquentiel, temporel, en mouvement, qui nous entraîne dans une histoire par une séquence d’images et par le mot écrit. La peinture est statique, la BD est dynamique. » Alliant art visuel et littérature, Robert Freynet confie que c’est depuis l’âge de neuf ans qu’il crée des bandes dessinées.

 

Artiste engagé ?

 

L’amour de la francophonie n’est jamais loin dans la vie de celui qui a étudié la peinture à Bordeaux, en France. Son désir de transmettre les traces du passé pour mieux savoir où l’on va anime bon nombre de ses œuvres. « Lorsqu’on creuse un peu dans les livres d’histoire, on se rend compte que nous marchons ici sur une Terre sacrée. De véritables géants nous ont précédés. Leurs vies sont comme des pièces intéressantes qui se sont jouées sur la même scène que nous occupons aujourd’hui. Si, dans le cadre d’une recherche dans un livre d’histoire poussiéreux, je découvre un fait inusité et passionnant, j’ai hâte de le mettre en scène, avec art, en bande dessinée pour le rendre accessible à tous. J’ai remarqué qu’une fierté se développe chez l’habitant lorsqu’il connaît un peu l’histoire de son coin de pays. Une construction identitaire s’opère, et il a tendance à s’impliquer davantage dans la communauté pour aider à créer une vie future plus riche. »

 

Son engagement envers la communauté est réel, senti, inspirant. Il vient du plus profond de son être. « Les Franco-Manitobains, voire les Canadiens français, vivent leur situation minoritaire en revendiquant, en s’organisant, en défiant l’inévitable, en s’adaptant, en s’exprimant à travers une culture particulièrement dynamique. Cette joyeuse communauté m’a beaucoup nourri, et j’ai envie d’en faire partie, de participer à son épanouissement. Je veux aussi parler, dans mes bandes dessinées, de son histoire surprenante dans l’Ouest canadien. »

 

En même temps, il ne ferme pas la porte à l’autre. La preuve, sa bande dessinée sur Louis Riel a été traduite en anglais. Quelles ont été les réactions des anglophones à la lecture de ce héros francophone ? « On a été étonné, en lisant Louis Riel, Patriot (Vidacom) de l’ampleur et la complexité de cette histoire. La perception du Canada anglais par rapport à Riel n’est pas nécessairement la même que pour le Canada français. Traître pour l’un, héros pour l’autre, on apprécie donc cette seule et unique bande dessinée en deux versions, anglaise et française. Les médias anglophones en ont beaucoup parlé. »

 

Un mot sur les projets à venir ? « Je peaufine actuellement ma toute dernière bande dessinée : Mission Rivière-Rouge – L’histoire d’un peuple et de son Église. Je suis à la dernière étape de production avant sa publication aux Éditions du Signe en France. Cette BD sera disponible au grand public dès le 1er juillet 2018, aux Éditions des Plaines et chez les libraires. C’est à l’occasion du bicentenaire 1818 – 2018 de l’arrivée de l’Abbé Provencher à la Rivière-Rouge que j’ai créé une bande dessinée qui met en scène des faits historiques marquants de l’Église catholique dans l’Ouest canadien. On y découvre la traite des fourrures, les voyageurs, la chasse au bison sur la prairie, l’épopée des Métis et des Premières Nations, la fondation de la province du Manitoba… J’ai aussi un autre projet, déjà entamé, d’une bande dessinée intitulée : Voyageurs des Prairies – Les aventures de Jean-Baptiste et Marie-Anne Lagimodière. Ce couple pionnier marqua les débuts de la Rivière-Rouge à l’aube du XIXᶱ siècle. Leurs aventures légendaires seront racontées à travers la lentille du neuvième art. Cette prochaine bande dessinée sera publiée aux Éditions des Plaines. »

 

Une histoire à suivre assurément.

Artiste multidisciplinaire, il aime la bande dessinée, la peinture et aussi la sculpture à l’occasion. L’artiste né à Saint-Boniface, au confluent des rivières Rouge et Assiniboine, transmet aussi son savoir à travers des cours de peinture qu’il donne à la Maison des artistes – ancien Hôtel de Ville de Saint-Boniface –, qu’il a cofondée en l’an 2000 avec quatre autres artistes. L’endroit idéal pour la relève.

 

En ce qui concerne ses créations, quels sujets l’artiste affectionne-t-il en particulier ? La religion pour le côté spirituel que lui procure l’acte de peindre… Et l’histoire. À tel point que La Vérendrye et Louis Riel lui ont inspiré des bandes dessinées publiées aux Éditions des Plaines.

 

Du plus grand au plus petit

 

Mais y a-t-il une forme d’art qu’il affectionne plus particulièrement ? « J’aime bien peindre les peintures murales intérieures, avec ses

Il a plusieurs cordes à son arc. Vous voyez, bien sûr, ses dessins dans Le Nénuphar chaque mois. Mais si vous êtes déjà passé par le Palais législatif du Manitoba, la cathédrale Saint-Boniface ou sur le site historique Monseigneur-Taché à Sainte-Geneviève, vous avez sans doute aussi vu ses murales. Mais Robert Freynet, c’est beaucoup plus que cela.

Robert Freynet ou l’homme aux multiples pinceaux

Robert Freynet

Marie-Ève Fontaine

Sur les planches avec la Bonifacienne
Marie‑Ève Fontaine

Lauréate en 2016 du Prix Roland Mahé-Banque Nationale, choisie, en début d’année, par l’Université de Saint‑Boniface (USB) pour souligner, sous forme théâtrale, le 200 ͤ  anniversaire de l’éducation française au Manitoba, tête d’affiche de la pièce Le dire de Di de Michel Ouellette, Marie‑Ève Fontaine fait de plus en plus sa place sur la scène théâtrale francophone.

Avec le Cercle Molière, le Manitoba francophone peut compter sur la plus ancienne compagnie de théâtre, en langue française, au Canada. On y trouve également une culture très forte de l’improvisation. Ce n’est pas moi qui le dis, mais Marie‑Ève Fontaine dont les parents ont fondé des ligues d’improvisation au Manitoba. Le terreau familial était donc propice à l’éclosion d’une femme de théâtre.

Cependant, étant née à Saint‑Boniface, elle a dû faire un choix quand est arrivé le moment de décider de son parcours universitaire. Était-il possible de suivre une formation en théâtre en français au Manitoba? « Non. » La réponse avait le mérite d’être claire. Il y a bien quelques cours de base qui sont offerts, mais rien qui permet l’obtention d’un baccalauréat. D’où le cap vers l’Université d’Ottawa. « Mais je faisais fréquemment la navette entre l’Est et chez nous! » De plus, les projets ne manque pas pour  la jeune comédienne, puisqu’elle est à la fois auteure et metteuse en scène.  

Afin de souligner le 200 ͤ  anniversaire de l’USB, mais également l’importance de l’éducation en français au Manitoba par les Pères Oblats, depuis l’arrivée en 1818 de l’abbé Norbert Provencher sur les rives de la rivière Rouge. La direction de l’université a demandé à Marie‑Ève Fontaine de mettre en scène ce qui allait devenir le Projet 200. Montée en collaboration avec la troupe universitaire Les Chiens de soleil, la création collective Projet 200 a réuni en mars dernier plus d’une vingtaine de personnes. Elles se sont occupées non seulement de la technique, mais également de l’interprétation d’une centaine de personnages tous réunis dans une quinzaine de tableaux relatant en images, en musique et en humour cette importante page de l’histoire franco-manitobaine. « C’était en majorité des étudiants, mais on a aussi eu quelques membres de la communauté, et même des gens qui étaient en immersion! » Parmi les seize comédiens du spectacle, Marie‑Ève est très fière de dire que cinq étudiants internationaux étaient aussi de la distribution, symbole du renouveau franco‑manitobain.

Ce n’était pas sa première collaboration avec la troupe universitaire. En effet, en 2016, Mme Fontaine avait conçu, écrit et mis en scène La Création. Cet autre projet offrait aux participants un laboratoire sur le jeu d’acteur et le travail de création.  

Jouer en français

Expérimenter, s’impliquer sur la scène et travailler le plus possible en français, c’est ce qui se dégage de la passion du théâtre chez Marie‑Ève Fontaine.

Alors quand, en 2016, est survenu ce coup de pouce avec le Prix Roland Mahé-Banque Nationale de la Fondation pour l'avancement du théâtre francophone au Canada, ce fut très apprécié par l’artiste. Non seulement, y avait-il une bourse de 5 000 $ offerte avec le prix, mais c’était aussi « une tape dans le dos ». Selon la comédienne, si au Manitoba il y a peut-être moins de formation en théâtre, cela ne veut pas dire que « nous sommes dans un milieu moins enrichissant parce nous sommes moins nombreux. » Il faut sortir de ce complexe d’infériorité. Toutefois, un tel prix permet d’avoir accès à un plus grand réseautage, d’où l’importance de faire connaître ce prix à ceux qui sont dans des situations encore plus minoritaires comme à Saskatoon. »

Marie-Ève Fontaine dans Dire de Di de Michel Ouellette, crédit photo : Marc LeMyre 

Après la pièce Dehors jouée au Centre du Théâtre d’Aujourd’hui à Montréal, les premiers mois de 2018 se sont poursuivis à Toronto et à Ottawa avec Le dire de Di de l’auteur franco‑ontarien Michel Ouellette. Saluée par la critique, la pièce aborde l’histoire d’une jeune fille dont la famille est aux prises, dans le Nord de l’Ontario, avec l’expropriation et la déforestation, en raison de la présence d’une compagnie minière. Une présence qui bouleversera tant le paysage que les gens.

Le reste de l’année devrait s’annoncer tout aussi passionnante pour Marie‑Ève Fontaine. Elle travaille actuellement sur un projet qui devrait porter sur un 

Dans Dehors de Gilles Poulin-Denis, crédit photo : Maxime Côté 

échange épistolaire qui s’est déroulé dans les années 1980 entre l’ancien dictateur panaméen Manuel Antonio Noriega Moreno et une adolescente américaine au moment où celui-ci était traqué par la CIA, après avoir été longtemps un ami de la Maison-Blanche. Décidément, Marie‑Ève Fontaine n’est pas sur le point de se reposer sur ses lauriers!

Andréanne Dandeneau

Ce sont les qualités associées à la ligne de vêtements Voilà de la créatrice de mode, métisse et franco-manitobaine, Andréanne Dandeneau. Mais c’est aussi plus que ça. C’est l’expression créative d’un engagement social.

Andréanne Dandeneau

Née à Saint-Boniface, elle a tour à tour fréquenté l’École Taché, fait son secondaire au Collège Louis-Riel et étudié une année en sciences des textiles à la Faculté de l’écologie humaine de l’Université du Manitoba. Mais comme elle voulait étudier la mode dans la langue de Gabrielle Roy, elle s’est inscrite au Collège LaSalle, à Montréal, dans un programme en design de mode d’une durée de trois ans.

De retour au Manitoba en 2003, le Conseil de développement économique des municipalités bilingues du Manitoba (CDEM) l’aide à monter sa première entreprise. « Ça m’a donné la piqure de l’entrepreneuriat. » Deux ans plus tard, à 25 ans, toujours avec le soutien du CDEM, mais aussi d’Entreprise autochtone Canada, elle lance Voilà par Andréanne.

« Je crois que le confort est la meilleure tendance à suivre, ce sera toujours en vogue.  C’est à partir de cette croyance, et valeur de base, qui a orienté mon choix de tissus et de conceptions, j’ai développé un style d’inspiration classique influencé par mon héritage métis. » Comme elle a fait de la danse contemporaine dans sa jeunesse, Andréanne Dandeneau a d’abord commencé en faisant « des costumes de danse qui ne gênaient pas les mouvements. »

En plus de ses propres collections, elle collabore avec son père, David Albert, à la création de vêtements pour diverses compagnies de danse locales.

tragédie survenue au Bangladesh en 2013, à Dacca, alors que plus de 1 100 travailleurs avaient été tués lors de l’effondrement du Rana Plaza, mettant ainsi en lumière les déplorables conditions des travailleurs du textile.

Et en quoi la collection Voilà est-elle inspirée de la nation métisse ? « Les imprimés floraux, les tissus soyeux et les lignes onduleuses de mes vêtements s’allient pour évoquer les Prairies et la culture métisse. En tant que conceptrice, mon plus gros défi consiste à savoir jongler entre créativité et exigences commerciales, deux éléments qui peuvent parfois être contradictoires. Heureusement, j’ai pu profiter du soutien de ma communauté francophone, de mes premières clientes et de mes parents, sans lesquels rien n’aurait été possible. »

Des projets pour 2018 ? Refaire le logo de la compagnie, traduire en français le site Web, percer le marché du Québec et offrir de la formation aux employés pour la gestion des foires vestimentaires auxquelles Voilà participe.

Et un mot sur la collection d’été 2018 ? « Elle offre une nouvelle perspective sur la fusion du romantisme, du confort et des couleurs. » Avec comme toile de fond le désir de toujours offrir à la clientèle  un patrimoine métis et franco-manitobain. « C’est une question à la fois économique et culturelle. »

 

Pour mieux découvrir les créations d’Andréanne Dandeneau : https://voiladesigns.ca/

Confortables, élégants, faciles à porter et…

confectionnés en français!

Adepte du slow fashion

Andréanne provient d’une famille pour laquelle la nature a toujours été importante. « Avec nos parents, et depuis mon tout jeune âge, mes frères, ma sœur et moi avons fait beaucoup d’activités dans la nature : voyages en canot, camping, etc., et nous avons pratiqué le recyclage dans notre famille. Mes ancêtres métis vivaient de la nature, ils ont donc développé un respect pour leur environnement. Je crois qu’il faut être fidèle à ses valeurs. D’ailleurs ma sœur jumelle et moi conduisons des petites voitures hybrides! »

Tout naturellement, la jeune créatrice s’est tournée vers ce que les gens de la mode appellent le slow fashion par rapport au fast fashion. Le premier est en opposition avec le second, alors que celui-ci, selon Andréanne, « signifie que les produits de la mode faits outre-mer, de qualité inférieure, avec du matériel synthétique et au plus bas prix, ne se soucient pas de l’environnement. » On se souviendra de la

Dans la foulée du slow fashion, Andréanne a développé, avec un tisseur de Toronto, « un molleton de bambou super confortable qu’il tisse uniquement pour nous. Ce tissu est unique en Amérique du Nord et notre clientèle, ayant vécu une fois l’expérience du confort, y demeure fidèle. Le bambou est plus difficile à travailler que le coton, mais c’est très bien pour le drapé. » Par la suite, le tissu est teint en Ontario à l’aide de colorants organiques, qui sont mieux absorbés par les fibres naturelles, « contribuant ainsi à réduire les infiltrations polluantes. »

Danèle Déquier

Danèle Déquier vient de finir son secondaire… plus riche de son diplôme, mais aussi de 1 000 $, résultat de son engagement pour la francophonie au sein de l’École secondaire Pointe-des-Chênes, à Sainte-Anne.

Danèle Déquier

L’Association des collèges et universités de la francophonie canadienne (ACUFC), de concert avec la Fédération jeunesse canadienne-française, vient de décerner ses bourses de 1 000 $ dans le cadre du programme Jeunes engagés. Au total, une dizaine de Franco-Canadiens ont vu leurs efforts récompensés pour avoir soutenu le fait français au sein de leur communauté étudiante. Les actions de ces jeunes peuvent être de nature politique, juridique, culturelle ou technologique. Le programme Jeunes engagés valorise la participation citoyenne chez les jeunes de 25 ans et moins et encourage la poursuite d’études postsecondaires en français dans un établissement membre de l’ACUFC.

Parmi les lauréats de 2018, on compte deux Franco-Manitobaines, Chloé Freynet-Gagné, qui étudie à l’Université de Moncton, ainsi que Danèle Déquier.
À 18 ans, au cours de la dernière année à Pointe-des-Chênes, celle-ci s’est notamment engagée au sein de son école secondaire dans le programme JMCA, axé sur le leadership en français. Danèle fait aussi partie

de l’administration du Conseil jeunesse provincial du Manitoba. « Le français est une valeur importante pour ma famille », mais aussi pour ses amis, confie-t-elle. Et puisque « c’est important de pratiquer notre langue » comme elle aime à le dire, elle a participé également aux derniers Jeux de la francophonie canadienne en 2017 dans le volet théâtre. On pourrait aussi parler de ses participations à divers forums jeunesse comme ceux du Français pour l’avenir.

 

Membre d’une famille profondément ancrée dans la vitalité du français au Manitoba, Danèle Déquier ne compte pas s’arrêter là. Bien qu’elle ne sache pas vraiment quel domaine étudier à l’Université de Saint-Boniface, une chose est certaine : « Je vais continuer de m’impliquer », assure celle qui joue le rôle de conseillère, pour le secondaire, à la table du CA du Conseil jeunesse provincial, et qui s’est montrée quelque peu surprise de recevoir un tel honneur. « J’avais envoyé ma candidature, j’espérais, mais sans être certaine que je gagnerais. »

 

Et que compte-t-elle faire de ce 1 000 $? « Ça va certainement contribuer à mes études. » 

Vivre sa francophonie à 18 ans

Mathieu Lavoie

Franco smash

Franco-Manitobain de Winnipeg, Mathieu Lavoie a quitté famille et patrie pour se joindre à l’Université Dalhousie pour vivre sa passion : le volleyball.

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Mathieu Lavoie

Médaillé de bronze lors des derniers Jeux de la francophonie canadienne à Moncton-Dieppe avec son équipe de volleyball du Manitoba, Mathieu Lavoie s’est aligné au cours des derniers mois pour les Tigers de l’Université Dalhousie, en Nouvelle-Écosse. Un choix qu’il ne doit pas regretter puisque le jeune joueur de 19 ans a été élu recrue de l’année en Atlantique dans le cadre du volleyball universitaire.

 

« Ç’a été une expérience unique, un vrai défi », raconte celui qui joue au sein d’une ligue comprenant cinq équipes. Outre Dalhousie et l’Université du Nouveau-Brunswick, on retrouve également l’Université de Montréal, ainsi que celles de Sherbrooke et de Laval à Québec. Cette première année fut encore plus mémorable, étant donné que son entraîneur Dan Ota lui a demandé de jouer comme libéro sur le terrain. Habitué à un rôle plus offensif au Manitoba, en étant libéro, on confiait ainsi, à celui qui fait 1,75 m, une tâche beaucoup plus défensive, puisque le libéro est le joueur qui s’amène sur le terrain quand son équipe reçoit le service.

Un sportif fier de ses racines

 

Mathieu Lavoie n’est pas près d’oublier son expérience aux Jeux de la francophonie canadienne. En fait, il s’y est pris à deux fois avant de pouvoir y participer en 2017. « C’était quelque chose de spécial de voir tous ces athlètes parler en français. » Même si tout se passe en anglais au sein de son équipe à Halifax, l’étudiant en science affirme qu’il n’a pas envie de perdre son français. « Ça fait partie de mes valeurs », saluant au passage ses parents qui lui ont transmis l’amour de la langue de Gabrielle Roy. « J’essaie de toujours communiquer en français avec mes amis. »

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À ce défi linguistique, s’ajoute celui de passer plus de temps au gym afin de prendre plus de muscles (!) pour la prochaine saison, qui devrait compter près d’une vingtaine de matchs. « Je dois aussi améliorer mon jeu mental. »   

 

Cette deuxième année devrait en être une de consolidation. Mathieu Lavoie fera tout en son pouvoir pour permettre aux Tigers de terminer au-delà du troisième rang comme ce fut le cas cette année… et pour démontrer que la francophonie manitobaine a un digne représentant entre deux volées. 

Jacqueline Blay

Jacqueline Blay : des rives de la Méditerranée
aux plaines manitobaines

Récemment décorée de l’Ordre du Manitoba, Jacqueline Blay a fait de la terre de Louis Riel son champ d’expertise. Au point d’y consacrer une partie de sa vie à l’écriture de son histoire.

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Jacqueline Blay

Née en Algérie, élevée au Maroc, en France et en Espagne, Jacqueline Blay a d’abord abouti à Louiseville, petite ville de la Mauricie québécoise, à son arrivée en terre nord-américaine. Puis, par un heureux concours de circonstances, elle s’est retrouvée à la station CKSB-Radio de Saint-Boniface à titre de discothécaire. Issue de cette communauté des Pieds-Noirs qui colonisa l’Algérie au nom de la France, Mme Blay est d’avis que son installation au Canada constitue pour elle une seconde naissance. Elle estime même qu’elle n’aurait pu devenir en Algérie l’historienne qu’elle est maintenant au Manitoba. Pourquoi? « Parce que l’Histoire de ma communauté d’origine a dû attendre plusieurs décennies avant de pouvoir être racontée avec objectivité et par des sources primaires et secondaires des deux côtés de cette médaille. Il a fallu attendre les travaux de quelques historiens, dont Benjamin Stora, pour faire ce devoir de mémoire et c’est très bien ainsi. »

Son titre d’historienne lui donne évidemment une position privilégiée pour juger de l’évolution de la francophonie manitobaine. En 50 ans, « le visage de la francophonie manitobaine a évolué dans le domaine de la diversité. Il y a beaucoup plus d’immigrants francophones que par le passé, même si dès la fondation de la province, le Manitoba français a tenté de faire venir des francophones du Québec et de France. » Et qu’en est-il de la fierté franco-manitobaine? A-t-elle changé au fil de ces décennies? « La fierté demeure toute aussi vivace, en ce sens que les gens sont toujours très sensibles au fait qu’ils ont des valeurs bien singulières par rapport au reste du Canada et ce qu’elles ont été, et sont un socle pour la francophonie d’aujourd'hui »

Scruter l’histoire

Depuis quelques années, Jacqueline Blay s’est attelée à raconter l’histoire des francophones au Manitoba. Elle est rendue à son troisième tome. Une gigantesque tâche. « Je ne suis pas surprise par l’ampleur du travail et cela fait des années que je me penche sur ces ouvrages, notamment dans la recherche préliminaire. Même en ayant une maitrise en histoire canadienne, il reste toujours quelque chose de neuf ou un nouvel angle à fouiller. »

Et que peut-on s’attendre pour les deux autres volumes de l’Histoire du Manitoba français à être publiés aux Éditions du Blé? « Les tomes 4 et 5 vont susciter le plus grand intérêt parce que les gens vont se reconnaître ou reconnaître un parent. La plupart de ceux et celles qui me parlent de mes livres me disent qu’ils me font confiance pour dire les choses comme elles se sont passées. Et c’est possible d’honorer cette confiance grâce aux sources primaires sur lesquelles je travaille depuis plus de deux à trois ans maintenant. »

Un mot, en terminant, pour la jeunesse franco-manitobaine. « Je souhaite aux jeunes francophones du Manitoba de bien saisir les rênes de cette communauté qui a beaucoup de vigueur, mais qui, en même temps, est assaillie par des instruments d’assimilation inconnus de leurs parents ou grands-parents. Ils ont accès à des outils communautaires de développement bien rodés et ils sont en cohérence avec leurs pairs anglophones dans bien des domaines. La majorité anglophone n’est plus une menace identitaire pour eux. Ils sont très à l’aise devant les défis qui s’y rattachent. »

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